La vie d'un artisan - céramiste

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L'histoire de la céramique au Portugal est faite de nombreux moments, époques et modes. Parler de l'ensemble de son évolution au Portugal reviendrait à écrire un livre. 

Pour faire court et commencer cette série d'interviews intitulée "Une vie d'artisan", nous avons interviewé Maria José, une céramiste qui a commencé à l'âge de 14 ans. Voici un petit bout de son histoire d'artisan.

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Bonjour Maria, pouvez-vous vous présenter ?

Bien sûr, je m'appelle Maria José, j'ai 62 ans et j'ai travaillé 16 ans comme céramiste. Au départ, dans une usine appelée "Argil" à Torres Vedras où l'on fabriquait de la vaisselle dite décorative avec un style italien et 17ème siècle, en faïence. Puis dans une deuxième usine appelée "Soterracotta" qui était située à Abrunheira, Ramalhal où l'on fabriquait de la vaisselle utilitaire en grès. Ces deux usines sont malheureusement fermées et je suis restée jusqu'à la fin à chaque fois.

Quelles études avez-vous faites ? Comment avez-vous appris le métier de céramiste ?

Aujourd'hui, je crois que c'est l'équivalent de la 6ème, à mon époque on l'appelait le cycle préparatoire. J'ai appris la céramique à 14 ans, quand je suis entrée à l'usine "Argil". Nous n'avions pas de formation auparavant, nous apprenions en travaillant directement sur les pièces.
J'ai commencé comme apprenti verseur-finisseur, puis je suis passée à la section frittage, peinture, remplissage et émaillage. J'ai tout appris sur le terrain, comme on dit.

Quelle a été votre première impression avec ce nouveau travail ?

J'ai adoré ! J'avais seulement 14 ans "coitadinha de mim” (pauvre de moi) mais à mon époque, c'était comme ça, les enfants aidaient leur famille et contribuaient. Pour être honnête, je voulais être infirmière, mais je n'ai pas fait d'études, alors je suis allée travailler dans la céramique. Mais j'y ai été heureuse au final..

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Que pouvez-vous nous dire d'une "journée typique" à l'usine ?

Une journée typique pour moi consistait à récupérer les plats et à les finir, c'est-à-dire que lorsqu'ils sortaient des moules, ils avaient de petites imperfections. Je devais gratter, couper l'excédent et ensuite passer une éponge pour enlever ces imperfections. Puis une fois les finitions effectuées, les plats étaient placés dans des étagères pour le séchage avant de passer au four. Une fois cuits à 970 degrés, ils devenaient "forma de chacota” (ce qui signifie une pièce de vaisselle cuite une seule fois).
Le lendemain, c'était l'étape de la peinture. J'étais peintre décoratrice. En fait, je faisais tout travailler l'argile et les moules en plâtre.
Les plats étaient donc peints à la main avec de la peinture à basse température (tinta de mufla) puis émaillés, c'est-à-dire baignés dans du verre liquide. Une fois le processus de nettoyage du verre excédentaire terminé, les pièces étaient cuites au four à 1200 degrés.

S'il s'agissait d'un décalque, le plat allait trois fois au four : d'abord pour cuire l'argile, ensuite pour l'émail, puis il retournait au four pour fixer le décalque et finir de cuire.

Je travaillais de 8 heures à 17 heures. L'usine comptait une vingtaine d'employés, hommes et femmes. C'est d'ailleurs là que j'ai rencontré mon premier mari !.
Ensuite, j'ai aussi fait de la porcelaine mais pas tant que ça.

Et quel était le processus de création et de vente des pièces ?

Il y avait un catalogue avec les différents dessins ou avec des photos des pièces finies prêtes à être vendues. Et aussi une vitrine.
Puis les clients - surtout des magasins - passaient leurs commandes. À l'époque, nous vendions beaucoup pour le quartier du Chiado à Lisbonne. Puis, il y a eu l'énorme incendie d'août 1988 et nous n'avons plus jamais vendu pour eux. Ce fut un tournant.

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Pouvez-vous nous dire ce que vous avez le plus aimé faire ?

La peinture car c'est à ce moment-là que l'on donne à la pièce sa valeur, son identité !
Beaucoup de gens ont reconnu la difficulté et l'art qui se cachent derrière ce travail. Ça n'est pas aussi facile qu'il n'y parait. D'ailleurs, un jour, j'ai eu une apprentie qui avait une formation des Beaux-Arts. Elle a travaillé un jour et n'est jamais revenue, c'était trop pour elle (rires). Au cours de toutes mes années de travail, j'ai enseigné à beaucoup de gens.

Et qu'est-ce qui vous manque le plus de ces moments-là ?

Ma jeunesse ! Je suis restée jusqu'à la fermeture des deux usines. J'aimais tout ! De l'argile à l'emballage pour le client. C'était devenu ma passion.

Que pensez-vous des usines et des modes de production d'aujourd'hui ?

Trop de machines, trop d'automatisation et trop peu de main-d'œuvre. Le processus n'est plus manuel et les objets perdent leur personnalité, leur charme et surtout leur émotion.

Et enfin Maria, pouvez-vous nous dire quel est votre plus grand rêve ?

Ouvrir mon propre atelier de céramique, c'est sûr.
Quand je vois les petites boutiques dans ma rue, je me dis que ce serait mon rêve d'en avoir une, l'atelier serait derrière et devant la partie boutique.
Qui sait, peut-être qu'un jour
...

Merci Maria de nous faire revivre la vie d'un céramiste dans les années 70 et 80.

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